Maintenant, regardons comment les fabricants d'écrans s'y prennent pour obtenir les noirs les plus profonds afin d'améliorer très sensiblement les contrastes selon la technologie de dalle qu'ils ont choisie. En effet, pour obtenir le plus de contraste possible et puisque qu'on fixe "normativement" la luminance de l'écran à 100 cd/m², il faut s'atteler aux noirs et il faut idéalement des noirs à 0,001 cd/m² au minimum si l'on veut se rapprocher des performances de l'œil humain et ses 100 000 : 1. Avec les technologies LCD "classiques", donc qui n'utilisent pas de techniques particulières dont nous allons bien entendu reparler, on en est très loin en 2024. Avec les dalles OLED, beaucoup plus récentes et complètement différentes, la donne est bouleversée. Voici la situation en 2024 car les Leds des écrans LCD n'ont pas dit leur dernier mot...
1 - Obtenir des noirs profonds sur les dalles LCD : Leds, Mini-Leds, etc.
Sur les dalles LCD de base - donc à cristaux liquides - il était impossible d'obtenir une grande profondeur de noir jusqu'en 2020/2021 car les Leds qui constituent le rétroéclairage, (beaucoup moins nombreuses que les pixels), doivent être allumées en permanence et les cristaux liquides qui s'interposent entre elles et les pixels RVB de la dalle n'arrivent pas à les cacher complètement. Il persiste de très légères pertes de lumières qui font que les dalles LCD affichent le plus souvent un noir à 0,1 ou 0,075 cd/m² au maximum... sans utiliser d'artifices. Le contraste maximum d'une dalle LCD de "base" calibrée à 100 cd/m² est alors au mieux de 1500 : 1. On n'est effectivement loin des 100000 : 1 demandé par notre œil.
Maintenant, les ingénieurs des écrans LCD ou des télévisions utilisant des Leds ne sont pas restés les bras croisés et ont cherché à améliorer l'idée du rétroéclairage car il possède tout de même un sérieux avantage par rapport aux écrans OLED... dont nous parlerons dans le paragraphe suivant. Comment s'y sont-ils pris ? En jouant sur plusieurs points techniques :
a - la disposition des Leds du rétroéclairage,
b - sur leur nombre, leur taille, et sur la distance entre les Leds et les cristaux liquides.
Toutes ces idées ou améliorations sont parfois géniales vous allez voir... mais ont un prix, vite conséquent... comme on s'en serait douté !
a) La disposition des Leds
Il est possible de disposer les Leds soit uniquement autour de l'écran donc sur ses bords ou bien uniformément sur toute la dalle. Cela coûte évidemment moins cher sur les bords.
- Rétroéclairage sur les bords (Edge LED) - Le plus simple et le moins cher - Les Leds sont placées sur les bords ou tout autour de la dalle. C'est moins cher mais c'est également la solution la moins performante. Cela peut convenir pour un usage photo mais en vidéo on sera loin de prendre une claque visuelle ! Surtout, il n'est pas possible de mettre en place le fameux Local Dimming dont on va reparler ci-dessous. Que ce soit pour les écrans photo, vidéos ou les téléviseurs, passez votre chemin...
- Rétroéclairage Direct LED ou Full LED - Là, évidemment c'est beaucoup mieux - donc c'est plus cher ! - mais on va voir qu'il y a encore deux cas de figures, très significativement différents : si le rétroéclairage Full LED contient peu de Leds (image ci-contre), ou s'il possède de très nombreuses Leds qui sont alors des Mini-Leds (ci-dessous).
b) Le nombre de Leds ou Mini-Leds et l'avantage technique que cela offre...
Il est donc possible de placer plus ou moins de Leds sur une dalle LCD : mais pour quel avantage ? Eh bien pour pouvoir éteindre les Leds quand elles sont inutilisées car cela permet alors afficher des noirs vraiment plus profonds à cet endroit, pardi (image ci-contre) ! Et pour cela il faut placer des Mini-Leds dans le rétroéclairage afin d'en augmenter le nombre. On appelle cela le Local Dimming ou Affichage dynamique local.
Annexe 1 - Le Local Dimming - Cette technique permet donc d'éteindre ou diminuer le rétroéclairage sélectif des Leds là où ce n'est pas nécessaire. L'idée est vraiment ingénieuse. Mais on comprend immédiatement que pour que cela fonctionne bien il faut beaucoup de Leds ! C'est pour cela que certaines dalles Direct ou Full Led sont à rétroéclairage Mini-Leds. C'est le Nec Plus Ultra en 2024. L'écran Apple Pro Display XDR en possède par exemple 576 mais le dernier Dell UP3221Q que j'ai adoré en possède 2000 ! Sur la photo ci-dessous, vous pouvez en compter 960 :
Vous l'aurez compris, plus il y aura de Leds et plus le Local Dimming sera utilisé finement et précisément. Et vous l'aurez également compris, le Graal serait d'avoir autant de Leds que de pixels or cela n'est possible qu'avec des Micro-Leds. On en est loin à grande échelle industrielle car cela coûte très cher (1000 euros le pouce en 2024 selon PPWorld).
Depuis février 2021 - Dans une interview vraiment très éclairante d'un ingénieur du fabricant de dalles TCL, PPWorld nous révèle qu'ils ont réussi grâce à une nouvelle technique appelée OD ZERO (Optical Distance = zéro) à tellement réduire la taille des Mini-Leds - sans pour autant parler de Micro-Leds - tout en les collant sur le panneau des cristaux liquides (d’où son nom), à éliminer l'effet de blooming car les zones de local dimming sont alors considérablement réduites. Ils parlent en effet de zones de seulement 150 microns alors que sur un écran à Leds conventionnelles on parle de bloc Led de 3000 microns. C'est effectivement très petit ! Rappelons enfin qu'un pixel sur un écran de 55 pouces possède une taille d'environ 0,31 mm.
Annexe 2 - Le Blooming - Oui, mais il y a un hic ! et cela s'appelle le Blooming que l'on peut traduire par "halo". En effet, lorsqu'on allume seulement les Leds utiles, elles ne suivent pas toujours les contours de l'objet éclairé à afficher et s'il est placé sur un fond noir, alors cela "fabrique" un halo artificiel autour de lui. Voici deux exemples que j'espère parlant de l'effet de blooming sur des dalles LCD à Mini-Leds avec Local Dimming :
Lors de l'essai de l'écran haut de gamme Apple - l'Apple Pro Display XDR, Juan Salvo a mis en évidence ce phénomène avec une séquence filmée parfaitement adaptée (ci-dessus). L'écran de comparaison est un moniteur FSI réputé à plus de 45000 € ! Sur ce deuxième exemple, nous allons prendre un cas de figure bête et méchant :
On voit très bien le halo bleuté autour de la croix lumineuse (très lumineuse !). Les Leds allumées pour afficher la croix "débordent" et créées ce halo gênant. Jusqu'à l'arrivée prometteuse début 2021 - sur le papier du moins car nous n'avons pas encore la possibilité de le voir - de l'OD ZERO des écrans TCL, il n'y a qu'en plaçant autant de Leds que de pixels que l'on pourra régler définitivement ce problème... À moins d'utiliser une autre technique d'affichage : l'OLED.
2 - Obtenir des noirs profonds sur les dalles OLED
Les dalles OLED, par construction, n'ont plus besoin de rétroéclairage et cela change tout du point de vue de l’affichage des noirs. En effet, les dalles OLED sont des dalles dites "organiques" (du matériaux vivant pour faire court) qui ne produisent de la lumière que quand elles reçoivent une impulsion électrique. Donc chaque pixel est indépendant de son voisin et le Blooming fait : "pschitt" car quand un pixel n'est pas excité il est parfaitement noir !!!
Donc sur les dalles OLED on va bénéficier de deux avantages énormes par rapport aux noirs donc nous avons besoin pour atteindre notre objectif d'affichage HDR : les noirs sont parfaits et il n'y a plus de blooming. Sur ce critère, l'OLED est parfait.
L'image ci-dessus montre clairement cette différence entre les deux technologies.
Note ! Sur le papier, le noir est si parfait qu'on atteint même 1 000 000 : 1, ce qui est flatteur ... mais inutile puisque l'œil est déjà bien servi avec 100000 : 1, je le rappelle ! Bon, ne boudons pas notre plaisir et considérons que cette technologie règle vraiment le problème de l'affichage des noirs, même dans une pièce sombre.
Note marketing ! Ne vous laissez pas totalement embarquer par les films de démonstration diffusés sur les TV OLED dans les magasins : ils mettent toujours en valeur les noirs en filmant toujours les objets sur fond noir, justement. Et franchement c'est très beau. Mais, avez-vous fait attention à la luminosité des hautes lumières, dans les reflets spéculaires sur ces mêmes dalles ? C'est moins flatteur cette fois. J'en reparle plus loin...
L'affichage des hautes lumières et autres reflets spéculaires en HDR
Comme nous l'avons déjà vu, la luminosité de notre écran, surtout si nous sommes plongés dans le noir, ne dépassera guère 100 cd/m². Or, de la même manière que des noirs profonds ajoutent un réalisme saisissant à nos films et vidéos, si nous arrivions à afficher les points lumineux vraiment très lumineux alors l'expérience visuelle sera... éblouissante ! Il nous faut donc, pour compléter nos noirs vraiment noirs, des blancs vraiment éclatants.
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