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Analysons ces trois courbes pour mieux comprendre comment elles vont se comporter et donc deviner comment les lumières vont être rendues.
1 - Comment vont-elles rendre les basses lumières jusqu'à 50 cd/m² donc jusqu'aux gris moyens ?
On voit que le point gris est rendu à l'identique avec les trois courbes. Un gris moyen est moyen avec les trois courbes. En revanche, dans les gris foncés, le rendu sera identique avec la courbe HLG (dont je reparle plus en détail page 5) et la bien connue courbe gamma à 2,2. Pour finir on constate que les gris foncés seront plus clairs avec la courbe PQ.
2 - Comment ces trois courbes vont-elles rendre les hautes lumières ?
Plus on va avoir à faire à des hautes lumières et plus elles vont être rendues plus "foncées" ou "grisées" avec les courbes PQ et HLG qu'avec la courbe gamma 2,2. Ainsi, sur la courbe PQ, un pixel qui serait blanc avec une courbe gamma de 2,2 (100 cd/m²) sera rendu par du gris à 60 cd/m² donc beaucoup moins blanc. Avec la courbe HLG, ce même pixel sera rendu par un gris clair à 70 cd/m². Voilà qui explique en partie pourquoi les hautes lumières en HDR ont ce rendu si particulier, un peu grisonnant dont je reparle en bas de cette page.
3 - Comment vont-elles rendre les très hautes lumières ?
On peut commencer par remarquer que la courbe HLG prévoit que les très hautes lumières soient atteintes vers 800 cd/m² - ce qui commence à arriver selon mes mesures des derniers écrans à Mini-Leds - alors que la courbe PQ atteint cette limite des blancs plus tard, à 1000 cd/m².
Comprendre le rendu HDR d'une vidéo
1 - Prenons un écran HDR mais pas spécialement lumineux (disons 300 cd/m² maximum)
Pour un usage SDR, photo ou vidéo, s'il est calibré à 120 cd/m² alors les plus hautes lumières photographiées ou filmées seront rendues par une luminance de 120 cd/m². On appliquera la même courbe gamma de 2,2 ou éventuellement 2,4 à ces images ou ces films. L'image aura une bonne "pêche" et si la dynamique de certaines scènes comme étudiées page précédente sera correctement rendue, les scènes très contrastées seront "cramées".
2 - Maintenant, activons le mode HDR sur ce même écran
En faisant cela, on ne peut plus le calibrer ET on va appliquer une autre courbe de gamma à notre écran, le plus souvent la courbe PQ (qui peut différer d'un écran à un autre d'ailleurs !). Qu'observe-t-on ? Les très hautes lumières (valeurs RVB à 255) seront affichées par la luminance maximum de l'écran donc ici 300 cd/m². Mais il y a deux mais !!!! Cela ne peut se faire que sur de petites régions de l'écran car je ne vous dis pas si vous avez la moitié de l'écran qui doit afficher une telle luminance alors que la scène d'avant était dans la pénombre vous allez être sacrément ébloui ! Donc comment font les ingénieurs ? Ils n’envoient ces plus hautes luminances que sur quelques pixels (bougies, reflets spéculaires, flammes). Reste le problème du rendu des lumières très claires mais pas maximales : eh bien comme en photo HDR qui a ce rendu si particulier, les hautes lumières sur un écran HDR sont rendues par quelques chose de clair mais pas trop donc très légèrement grisonnant.
Pourquoi les photos, les vidéos ou les films HDR ont ce rendu si particulier ?
Comme je l'explique sur ma page consacrée au gamma des écrans, notre œil également possède un gamma mais contrairement aux écrans qui sont toujours réglés à 2,2 en photo et éventuellement à 2,4 voire à 2,6 en vidéo, il est variable dans la "vraie" vie.
Le gamma de l'œil est variable !
En effet, le gamma de l'œil varie selon le niveau de luminosité de son environnement et le contraste de la scène regardée. Ainsi, le gamma de l'œil en plein soleil n'est pas du tout le même qu'à la nuit tombante afin que notre vision offre constamment un rendu "naturel". Et c'est cette quette que poursuit l'industrie de l'image depuis un siècle. Même en 2024, elle n'y parvient pas encore ! L'industrie a trouvé un bon compromis, très souvent acceptable car, comme hasard, c'est celui que l'on rencontre le plus souvent mais dès que l'on sort de ces images "standards" donc que les contrastes s'accentuent, les limites des techniques SDR apparaissent. Maintenant, comme on n'arrête pas le progrès, cette même industrie s’attelle aux problèmes d'affichage plus extrêmes. Il est vrai aussi que nous le voulions ou non, certaines situations de contrastes comme les images de villes la nuit étaient tellement contrastées que leur rendu naturel était totalement impossible. La donne change progressivement...
Les écrans de retouches photo affichent tout le temps un gamma de 2,2 et en vidéo on choisit parfois 2,4 ou même, pour les salles de cinéma, 2,6.
Si l'on a opté pour un gamma de 2,2 sur nos écrans lorsqu’on fait de la retouche photo c'est parce que historiquement, les anciens tubes cathodiques avaient une réponse dont la courbe était équivalente à une courbe gamma de 2,2 et qu'il se trouvait, par hasard, que cela correspondait en très bonne approximation à la réponse de l'œil à la lumière quand celui-ci regarde un écran dans une pièce pas trop lumineuse. Ce gamma de 2,2 convient donc parfaitement pour la retouche photo par exemple dans une pièce pas trop éclairée. En vidéo, la donne est un peu différente car on regarde souvent une vidéo dans une pièce sombre où un gamma à 2,4 est un peu mieux adapté afin que les parties sombres ne soient pas trop grises. Enfin, au cinéma, où l'on est forcément dans une salle d’autant plus plongée dans le noir que les murs sont noirs, un gamma de 2,6 est alors encore mieux adapté sans quoi les noirs des images paraîtront bien gris. Les normes vidéos préconisent évidemment un gamma à 2,2 pour l'espace couleur vidéo Rec.709, 2,4 pour le DCI-P3 voire 2,6 pour le Rec.2020 (norme cinéma). Ainsi, selon l'environnement dans lequel on est, le gamma de notre écran doit changer... mais cela dépend aussi du contraste de l'image que l'on regarde donc je mets mon billet qu'un jour on aura des écrans ou télévisions avec gamma variable à la volée tenant compte de l'environnement lumineux et du contraste de chaque image... 24 fois par seconde ! C'est bien le Graal qui se cache derrière la norme HDR Dolby Vision IQ et ses métadonnées image par image ou son concurrent direct de chez Samsung, le HDR10+ Adaptative. Le but ultime étant d'adapter l'écran au contraste de chaque image et pas de nous faire une cote mal taillée pas si géniale sauf, évidemment, ponctuellement quand une image et son contraste "colle", par hasard, parfaitement à l'écran à ce moment là.
Pour résumer, quand on affiche une photo HDR sur cet écran à gamma 2,2, le gamma n'est pas adapté à une telle image et le rendu est "HDRisé". Un peu spécial quoi !
Précision importante ! Comme je l'ai déjà précisé, le gamma "idéal" de l'écran pour une image "HDRisée" dépendra de son contraste - ou de sa dynamique - mais également de l'environnement lumineux dans lequel nous nous trouvons car notre œil ne réagit pas du tout de la même façon quand il est dans un environnement clair ou foncé. Je vous renvoie à ma page sur le gamma des écrans où je vous le montre avec deux images ...
Et dire que notre œil fait cette adaptation automatiquement constamment !
Donc s'il est techniquement possible de prendre une photo avec une dynamique folle, lorsque celle-ci sera affichée sur un écran à gamma fixe de 2,2, 2,4 ou même 2,6, son rendu sera très spécial, typique des images HDR donc pas du tout naturel le plus souvent. On peut le souhaiter à titre artistique mais si l'on veut un rendu plus naturel c'est impossible actuellement.
Dit autrement, en 2024 on sait prendre des images ou des vidéos HDR mais pas les afficher avec le rendu naturel que notre œil perçoit dans la réalité, quelque soit le contraste filmé ou photographié ! Il y a encore du travail et nous allons voir page suivante quelles sont les pistes techniques envisagées pour se rapprocher toujours davantage de la vision humaine, quelque soit la scène photographiée ou filmée.
Dossier HDR - Pages suivantes :
4 / 5 - Quelles sont les particularités des écrans photo ou vidéo et télévisions HDR ?
5 / 5 - Les normes HDR : HDR10, HDR1000, HDR10+, Dolby Vision |