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L'œil humain et sa perception des couleurs

 

L'œil humain et la perception des couleurs

Publié le 15 avril 2015   |  Mis à jour le 11 septembre 2023

 

L'œil "voit" - on devrait d'ailleurs plutôt parler de perception - donc perçoit les couleurs d'une manière bien étrange finalement ! Les cellules photosensibles qui tapissent la rétine ne voient, pour faire un énorme raccourci, qu'en rouge, vert et bleu ou carrément qu'en niveaux de gris ! Et pourtant nous "voyons" des milliers ou des millions de couleurs. Tout semble donc se passer dans le cerveau. Mais au fait, combien percevons-nous de couleurs ?


L'œil est un organe extrêmement complexe, fruit d'une très longue évolution. C'est lui qui nous permet de "voir" le monde en couleur et de percevoir des milliers de couleurs... quand il y a suffisamment de lumière sans quoi il voit en noir et blanc. Mais comment le fait-il ? Qu'est-ce que la couleur et combien l'œil peut percevoir de couleurs différentes ? Pourquoi et quand parle-t-on de gamma ? Comment la représenter numériquement ? Autant de questions auxquelles je vais tenter de répondre maintenant.


 

La lumière visible

Avant de comprendre comment l'œil voit les couleurs, intéressons-nous un peu à la lumière.

Propriétés de la lumière

La lumière est une onde électromagnétique (comme une onde radio ou les rayons X) et "sa couleur" dépend de sa longueur d'onde. Comme toutes les ondes, elle possède une infinité de longueurs d'onde différentes qui lui donnent justement ses "couleurs" lorsque l'on parle des couleurs visibles par l'homme. Quand les longueurs d'ondes sont courtes - vers 380 nm - nous les percevons comme du bleu-violet et quand elles sont plus longues - vers 700 nm - nous les percevons comme rouge. L'ensemble des ondes visibles s'appelle le spectre de la lumière visible. Au-delà du spectre visible pour l'homme se trouvent du côté des ondes encore plus courtes les rayons ultraviolets, puis les rayons X et enfin les rayons gamma et du côté des ondes plus longues, on trouve tout d'abord les infrarouges puis les ondes radios. On obtient traditionnellement un spectre de la lumière du soleil si on la fait passer à travers un prisme ou encore à travers des gouttelettes d'eau. Cela crée un arc-en-ciel dans certaines conditions météorologiques où l'on perçoit l'ensemble des couleurs ci-dessous.

   
Spectre de la lumière
  Spectre de la lumière visible par l'œil humain
 

 

L'œil humain et la lumière

Une image est formée par la cornée (qui est transparente sauf quand on vieillit) et est projetée au fond de l'œil, sur la rétine. Celle-ci est littéralement tapissée de cellules nerveuses. On parle de cellules photosensibles ou photorécepteurs - mais elles ont des propriétés singulières. Tout d'abord, il faut noter qu'elles se divisent en deux catégories : celles sensibles à la couleur - on les appelle les cônes - et celles uniquement sensibles à la clarté (en luminance donc en noir et blanc) que l'on appelle les bâtonnets. Pour voir en couleur donc pour que les cônes soient excités, il faut une certaine quantité de lumière. S'il n'y a pas assez de lumière donc la nuit par exemple, seuls les bâtonnets seront excités et nous voyons alors en niveaux de gris uniquement. Voilà pourquoi on dit que la nuit tous les chats sont gris. Alors certes on ne voit alors pas en couleur mais pour se "rattraper", les bâtonnets sont vraiment très sensibles à de très, très, faibles quantités de lumière ! Cette précision étant apportée, intéressons-nous aux cônes et à leurs propriétés.

Pour voir en couleur, il faut qu'il y ait suffisamment de lumière
 

Sensibilité spectrale des trois grandes catégories de cônes humains

Nous venons de voir que notre vision colorée du monde s'effectue grâce aux photorécepteurs appelés cônes. Or ces cônes possèdent à leur tour une singularité : ils ne sont pas tous sensibles à la couleur de la lumière de la même façon. En effet, certains cônes sont principalement sensibles dans le rouge, d'autres dans le vert et enfin les derniers dans le bleu.

Élément clef ! Il n'existe donc pas au fond de notre œil un type de cône par couleur. Les couleurs sont bien "reconstituées" et "perçues" dans le cerveau grâce au "mélange" de la perception de la lumière principalement bleue, verte et rouge (jaune si on regarde bien le diagramme ci-dessous). Notons au passage que les cônes "bleus" sont vraiment centrés sur le bleu, les cônes "verts" le sont vraiment sur le vert mais les soi-disant cônes "rouges" sont davantage centrés sur le jaune. Notez enfin que les cônes "verts" et "rouges" perçoivent de nombreuses couleurs communes.

   
  Sensibilité spectrale des cônes et bâtonnets humains
  Spectre d'absorption des couleurs d'un œil humain.
 

 

Les pixels d'un écranPourtant l'œil voit bien toutes les couleurs du spectre visible, du violet au rouge de manière continu donc c'est par le mélange de ces trois "couleurs" que le cerveau est capable de "fabriquer", de reconstituer, donc de percevoir toutes les "autres" couleurs. Voilà pourquoi on a inventé un modèle couleur RVB : pour nous rapprocher du fonctionnement de l'œil humain. Ainsi, les écrans ou les capteurs des APN possèdent des pixels Rouge-Vert-Bleu ou RVB et ne voit qu'en RVB ! Ils se rapprochent du fonctionnement l'œil humain grâce à trois "types" de pixels. Il suffit pour l'écran d'allumer plus ou moins chaque pixel de l'écran pour reproduire TOUTES les couleurs visibles ! Si l'on s'approche trop d'un écran d'ordinateur (image ci-dessus à droite), on voit les pixels RVB séparés mais ils sont fabriqués suffisamment petits pour que, vus par un être humain à distance normale, ils soient vus comme amalgamés en un seul pixel aux multiples couleurs.

   
 
 

Remarque amusante !


Grille de Bayer des appareils photo numériquesL'œil n'est pas sensible à toutes les couleurs de la même façon, de même d'ailleurs qu'il est plus sensible à de petits écarts de luminosité dans les basses lumières que dans les hautes. Les scientifiques ont remarqué que l'œil avait une sensibilité plus étendue dans le vert que dans les deux autres couleurs primaires (R et B). Voilà tout simplement pourquoi les capteurs des APN possèdent deux pixels verts pour un pixel rouge et un bleu quand on le regarde de près avec une loupe très grossissante.
Il en va de même avec les écrans ou les capteurs numériques. Quand on les regarde avec une forte loupe ou un microscope on peut constater qu'ils possèdent deux pixels verts pour un pixel rouge et un pixel bleu.

 
     
   
 

Synthèse additive ou soustractive ?

Avant d'essayer de mesurer le nombre de couleurs qu'est capable de voir un être humain, essayons de comprendre comment il perçoit les couleurs puisque qu'il ne possède pas un cône sensible à chaque couleur. Pour cela, analysons le fonctionnement d'un écran et d'une imprimante.
Un moniteur ou une imprimante ne travaillent pas avec les couleurs de la même manière : l'écran travaille avec des couleurs dites additives - Rouge, Verte, Bleue - ou RVB pour donner du blanc par addition comme on peut le voir au centre de cette animation couleur ci-dessous - alors qu'une imprimante travaille en mode soustractif - Cyan, Magenta, Jaune, Noir ou CMJN pour donner du noir par soustraction - (plus bas). Et bien il se trouve que le l'œil humain fonctionne un peu comme un écran (c'est une image bien entendu !) c'est à dire sur un mode additif.

Couleurs RVB additivesConcrètement, avec un écran qui travaille donc en mode additif, si l'on n'envoie aucun signal RVB aux pixels (0, 0, 0), l'écran reste noir. Il est noir par défaut. Pour obtenir du blanc (255, 255, 255) il faut éclairer chaque pixel Rouge, Vert et Bleu, comme le montre la figure ci-contre au maximum. Les autres couleurs sont obtenues en changeant la valeur de chaque couleur primaire. Pour afficher du jaune par exemple (255, 255, 0), il faut arrêter d'éclairer les pixels bleus (l'écran est bien jaune à l'intersection entre le vert et le rouge car les pixels bleus sont éteints). Seules trois couleurs ne nécessitent qu'un seul pixel. Les trois couleurs primaires et leurs déclinaisons en luminosité (de 0 à 255). Toutes les autres, c'est-à-dire les millions d'autres, seront un mélange d'au moins deux pixels de couleurs primaires plus ou moins lumineux.

Couleurs CMJ soustractivesAvec une imprimante, on part d'une feuille de papier déjà blanche par défaut car elle réfléchit à parts égales toutes les longueurs d'onde de la lumière visible. Donc là, c'est le contraire, si l'on veut du noir il va falloir projeter sur cette feuille de l'encre aux couleurs complémentaires, c'est-à-dire Cyan, Magenta et Jaune qui ont la particularité d'absorber à chaque fois une partie de la lumière visible. Dans la pratique il faudra aussi rajouter de l'encre Noire car 100% des trois autres couleurs ne permettent pas d'obtenir un noir profond à cause des impuretés contenues dans les encres mais un brun très foncé. On voit très bien sur l'image ci-contre que le centre est marron et non pas noir. Ces encres projetées au même endroit vont avoir la propriété d'absorber toutes les radiations lumineuses. Cet endroit apparaîtra donc noir maintenant. Si l'on veut que le papier paraisse bleu, il faut projeter dessus, au même endroit, du magenta et du cyan. Toutes les radiations lumineuses, sauf le bleu, seront absorbées. Seules les longueurs d'onde bleues de la lumière seront réfléchies à cet endroit.

Par convention, il a été décidé par la Commission Internationale de l'Éclairage - La CIE - que la couleur rouge primaire est une lumière d'une longueur d'onde de 700 nm, le vert de 546 nm et le bleu de 436 nm. Quelque soit la longueur d'onde de leurs pixels RVB, les fabricants d'écrans essayent tout de même de reproduire au mieux les couleurs...

Combien de couleurs sont perçues par l'œil humain ?

Restait donc à connaître le nombre de nuances colorées que l'œil humain peut percevoir dans ces fameuses trois couleurs dites primaires. Ce travail fut réalisé dans les année 30 sous l'égide de la Compagnie Internationale de l'Éclairage (La CIE). Elle demanda à de très nombreuses personnes de comparer attentivement des nuances de bleus, de verts et de rouge pour compter combien de couleurs différentes, en moyenne, elles étaient capables de distinguer. Il est alors ressorti de ces batteries de tests deux choses importantes :

  • Les êtres humains qui ont l'acuité visuelle la plus fine sont capables de distinguer jusqu'à 200 nuances par couleurs,... mais
  • jamais dans les trois couleurs primaires !
  • Et le gamut de l'œil "moyen" (l'ensemble des couleurs perçues) est très étendu : c'est le fameux espace L*a*b*.


Donc si un simple calcul arithmétique nous donne 200 x 200 x 200 soit 8 millions de couleurs perçues différentes, dans la réalité on en est très loin car les spécialistes des couleurs (chercheurs, professionnels du marketing couleurs) nous disent que 300000 (trois cent mille) serait beaucoup plus réaliste ! Si un œil très performant est effectivement capable de distinguer jusqu'à 200 nuances d'une même couleur primaire, ce même œil n'atteint qu'exceptionnellement cette prouesse dans les deux autres couleurs primaires.

Conclusion sur la perception des couleurs : certes l'œil humain est parfois capable de distinguer de nombreuses nuances pour une couleur donnée mais globalement il faut tout de même une différence importante entre deux nuances d'une même couleur pour que, sans ambiguïté, cette personne puisse affirmer qu'il a bien perçue deux couleurs différentes. Cela ne l'empêche pas de percevoir un gamut très important et large, le fameux espace L*a*b*. On commence à deviner que plusieurs combinaisons RVB coderont donc pour une même couleur perçue par un individu...

Il est maintenant venu le temps de savoir comment on décrit "informatiquement" une couleur. Typiquement, les couleurs sont décrites grâce à trois ou quatre chiffres selon que l'on travaille en RVB ou en CMJN, toujours avec comme objectif de reproduire le fonctionnement de l'œil humain. Ainsi telle couleur sera notée - 158, 128, 84 - en RVB et - 80%, 64%, 21%, 12% - en CMJN. Mais pourquoi ces chiffres et à quelle couleur perçue par un œil cela correspond-il exactement ?

   
 
 

À lire !


Retrouvez un guide complet du code des couleurs, de leurs usages et significations sur le site www.canva.com et notamment sur cette page "Code couleur et usage".


 
     
   
  Il s'agit dans la page suivante de savoir comment l'informatique traite ces couleurs alors qu'elle n'est capable que de fonctionner avec des 0 et des 1 - Les couleurs et l'informatique - 3 / 10  
   
 
 

À retenir !


La lumière est une onde électromagnétique dont les longueurs d'onde visibles pour l'homme varient de 380 à 700 nm environ (du violet au rouge). 

 L'œil "voit" - on parle de perception - grâce à des cellules photosensibles à la couleur et d'autres seulement à la luminosité. Les cellules sensibles à la couleur s'appellent les cônes. Ils sont surtout sensibles dans le rouge (la terre), le vert (la chlorophylle des arbres) et le bleu (le ciel). Il n'existe pas un cône pour chaque couleur. 

 Les cônes sont sensibles pour chaque couleur à environ 200 nuances, de la couleur la plus foncée à la plus claire :  cela représente donc 200 x 200 x 200 = 8 millions de mélanges de couleurs différentes pour un œil "moyen".

 En recomposant ou en mélangeant ces trois couleurs dites primaires le cerveau "voit" donc jusqu'à huit millions de couleurs... mais... 

 La plupart des êtres humains ne voient "que" un à deux millions de couleurs (!) car il est rarement aussi "performant" dans les trois couleurs primaires.

 
     
 
 
À travers ces 11 pages et trois vidéos gratuites nous allons apprendre tout le vocabulaire lié à la gestion des couleurs : les espaces couleurs, les profils ICC, les gamuts, etc. :

Sommaire des bases de la couleur

1 - Introduction à la gestion des couleurs
2 - L’œil et la perception des couleurs

  1 - La lumière visible
2 - L'œil et la vision humaine

3 - Les couleurs et l'informatique
4 - Le gamma
5 - Les espaces couleurs
6 - Les profils ICC
7 - Attribuer un profil ICC
8 - Convertir une image
9 - Modes de conversion : relatif ou perceptif ?
10 - Qu'est-ce que la calibration ?!

. . . . . . . . . . . . .

- Le vocabulaire pour les débutants + 3 vidéos gratuites

 
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